Prêtre en rupture..Témoignage (1)

Publié le par MICHEL

Aujourd'hui, curieusement plusieurs visiteurs de ce « blog » me posent des questions qui m'amènent à livrer plus simplement mon « témoignage » peut être en plusieurs articles.

 

(Pardon à ceux que cela pourrait importuner..)

 

 

 

Prêtre en rupture de ban avec l'Eglise depuis mon mariage en 1979, même si ce n'est pas celui ci qui est à l'origine de la rupture je me suis toujours plié à la discipline de l'Eglise.: disparaître de la circulation !

 

En 1979, dans les premiers mois du Pontificat du « Pape des droits de l'homme » les dossiers de demande de « réduction à l'état laïc » pour des Prêtres quittant le ministère ont été irrecevables et même si cela a changé dans les années suivantes (paraît il) je ne m'en suis plus jamais préoccupé d'autant que mon dossier a paraît il été « égaré »...Cette « réduction à l'état laïc » permettait au bénéficiaire de se marier à l'Eglise et de mener une vie chrétienne normale de laïc à condition d'oublier son « sacerdoce »...ce Sacerdoce venant de « melchisedech » lui même et déclaré sacrement à « caractère » par l'Eglise elle même, cette dernière ne peut pourtant rien contre lui sinon en empêcher l'exercice par une mesure disciplinaire, et c'est ce qu'elle fait !

 

 

 

Je peux dire que depuis cette période, le soleil ne s'est jamais couché sans qu'au cours de la journée je n'ai vivement ressenti en moi la réalité du « Sacerdoce » et le besoin de le vivre quelques soient les lieux ou les circonstances de la journée.

 

 

 

Une rupture comme celle que vivent les Prêtres qui quittent le ministère ne vient pas en un jour et elle ne se limite souvent pas à une cause ; même celui qui décide de se marier parce qu'il a rencontré l'amour humain n'a pas fait cette rencontre en un seul jour et par hasard...

 

Que de souffrances, que d'incompréhensions, que d'erreurs d'appréciations de de décisions malencontreuses des uns et des autres dans chacune de ces histoires tellement lourdes et quand je dis « des uns et des autres » je parle aussi bien des premiers intéréssés que de leurs frères, des communautés, des responsables : la question de ces ruptures est posée à tout le monde !

 

 

 

En 1968, ordonné Prêtre, je faisais mes études de Théologie à Rome en pleine période post conciliaire...

 

Jusque là, vocation traditionnelle dans milieu traditionnel, parcours en séminaire traditionnel et sans histoire, j'étais dans la trajectoire normale qui aurait du être sans problème : j'aimais beaucoup la Théologie et tout aurait du marcher pour le mieux...

 


 

Mais à Rome, j'ai fait trois découvertes qui ont mis à mal ce bel équilibre « traditionnel »..

 


 

Oui, originaire de milieu traditionnel, j'ai rencontré l »intégrisme », un intégrisme virulent et aveugle : ce n'était pas une théorie, c'étaient des camarades prêtres ou séminaristes avec qui nous partagions la vie de tous les jours, les offices, les jeux auxquels ils ne se mêlaient pas, les repas dans un réfectoire où ils se regroupaient dans leur zone, engoncés dans leurs soutanes camails et autres fanfreluches d'un autre âge ; par mon éducation et ma famille par certains aspects de mon parcours, je n'étais pas sans pouvoir communiquer un peu avec eux et jouissais comme quelques autres d'une certaine sympathie auprès d'eux : combien de soirées de discussions pour constater que l'on était devant un mur d'incompréhension : j'ai constaté qu'il n'y avait pas grand chose à faire avec ces personnes et pour ne rien cacher j'en ai beaucoup souffert car dans ma famille et mes amis beaucoup étaient proches de cette mentalité...

 

Il faudrait bien trouver un moyen que tout ce « monde » traditionnel ne tombe pas dans cet intégrisme obtus et sans avenir (pensai-je !)

 


 

La seconde découverte a été le « Concile » et plus précisément la constitution sur L'Eglise (Lumen Gentium » et l'un de ces corollaires le décret « Ad Gentes » sur la Mission d'une part et également la Constitution pastorale pour le monde de ce temps « Gaudium et Spes » et un texte d'inspiration comparable l'encyclique de Paul VI, « Populorum progressio » : sous la direction l'un des rédacteurs de l'encyclique et dans un groupe d'étudiants de tous les pays j'ai préparé mon mémoire de licence de théologie dans la mouvance de ces textes et sur le thème « Le travail de l'homme dans le dessein de Dieu ».

 

Là j'ai compris que rien de la Foi, de la geste du Christ, de la Nature et de la Mission de l'Eglise n'existe qui n'ait son enracinement dans la Création, la Création de l'homme à l'image de Dieu..: Création, Incarnation Redemption sont un seul et même dessein : le salut Universel.

 

Ce travail passionnant à plus d'un titre, l'échange dans le groupe, l'approfondissement des textes, la confrontation avec la Bible, s'est révélé pour moi d'autant plus fécond qu'en même temps que je tentais de le mener à bien, il m'a été donné de faire une troisième découverte.

 


 

Fortuitement et par le seul fait qu'il m'arrivait à l'occasion de véhiculer dans Rome des amis ou compatriotes de passage, j'ai rencontré des personnes très engagées dans des mouvements d'apostolat et qui dans la suite logique de la réflexion conciliaire sur l'apostolat des laïcs, et du fait que des laïques avaient été admis à participer au Concile commençaient de s'installer à Rome afin de donner à leurs mouvements et initiatives la dimension universelle qui découlait du Concile.

 

Je voudrais citer en particulier Marie Louise Monnet autour de laquelle se constitua rapidement un groupe d'échanges et de réflexions dont il m'arrivait de faire partie...Marie-Louise qui (sauf erreur de ma part) a été la première laïque admise au Concile avait été particulièrement sensible à un aspect de cette période : des évêques, des théologiens, des laïques de tous les continents faisaient tout simplement connaissance et prenaient un plaisir incontestable à se réunir de façon organisée ou informelle pour parler de leurs pays, de leurs Eglises, chacun prenant sa part de responsabilité par rapport à l'universalité (Catholicité de l'Église) Avec et grâce à ces personnes j'ai appris qu'avant d'être un mouvement impulsé par l'Église et ses Envoyés, la Mission est une oeuvre commencée avec l'existence, initiée dès la Création : être missionnaire c'est découvrir cette réalité au coeur de la vie des personnes et des groupes de personnes, pour la reconnaître, la proclamer, l'enrichir, la célébrer et la partager avec le plus grand nombre...

 

 

 

De toute cette expérience que je décris trop rapidement même si de façon un peu longue c'est comme une nouvelle « Vocation » que j'ai ressentie : personne, absolument personne ne peut être exclu de la démarche missionnaire de l'Église : si des intégristes au coeur apparemment « endurci » existent, c'est sans doute car il y a en eux quelque chose de Dieu que l'on n'a pas su discerner, un appel que l'on n'a pas su entendre ; encouragé et confirmé par des personnes et des petites expériences pastorales, j'ai compris que l'évangélisation des milieux traditionnels, de ces personnes heurtées et mises à mal par la violence de certaines ardeurs postconciliaires, remises trop brutalement en question dans la Foi et les pratiques qu'ils avaient reçus de l'Église elle-même était nécessaire : il n'y avait aucune raison de laisser ces personnes au bord de la route : il m'apparaissait clairement à beaucoup d'indices que ma Vocation devait m'engager vers ces personnes là.

 


 

Depuis j'ai cette conviction que la Mission de l'Église est de rapprocher comme deux tisons incandescents !

 

Le premier, c'est la Vie telle qu'elle irrigue et nourrit les personnes, les groupes de personnes, avec toutes leurs spécificités comme lieux d'autant de richesses dont la source est l'initiative du Créateur et dont personne n'est exclu : nos yeux sont myopes et ne voient pas toute la richesse de cette Vie, nos coeurs sont tièdes et ont du mal à en épouser toute la dimension...

 

Le second, c'est le Verbe, la Parole tels qu'ils se révèlent dans la Bible, dans la Tradition de Foi de l'Eglise : nos esprits sont trop limités, notre raisonnement trop encombré, pour discerner au delà des mots, dans la Vie du Peuple de Dieu et la lecture qu'en proposent les prophètes, dans les paroles et les gestes de Jésus, dans l'action missionnaire des Apôtres, le sens qui donne la trajectoire, la force qui donne l'énergie...

 

Quand le premier tison incandescent et le second se rapprochent, la flamme jaillit : elle a un nom c'est le Christ Réssuscité en qui la Vie et le Verbe se rejoignent et trouvent tout leur sens...

 

Cette flamme, le don de l'Esprit de Jésus c'est la Vie partagée, la Vie célébrée, la Vie éternelle déjà au milieu de nous et jaillissant dans l'épaisseur de nos existences...

 

maria-carmo.jpg

 

De retour en France, divers ministères m'ont été confiés mais il fallait à cette époque beaucoup de colonne vertébrale et de détermination pour tenir les objectifs et les conversions liées au Concile comme nous en parlerons dans un autre article.

Publié dans Moments de Vie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
E
Bonjour, comme je l'ai déjà dit, je suis contre les paroles hypocrites du pape, comment peut-on interdire des choses en étant lucide, je suis amie avec un aumonier militaire qui est loin de tout ça aussi, et pourtant que d'amour fraternel donne-t-il, la religion catholique devient sectaire, et dans certaines contrées, elle est homophobe ce que je défends, à mon âge jamais je n'avais connu autant de discrimination, ayant été pourtant éduquée à l'ancienne école chrétienne. A Ascon les gens sont outrés, et déçus. Le Christ n'a jamais voulu le malheur et le chagrin des siens. Amicalement.
Répondre
P
Bonsoir Michel... C'est un témoignage à suspense, dis donc ! Quel est le fait déterminant ta rupture avec l'institution catholique ? Il faudrait commencer par là et approfondir ensuite. Amicalement. Philippe
Répondre
M
Bonjour,Le fait déterminant ... est plus qu'un fait ou du moins c'est un fait qui tient son importance et son côté un peu dramatique d'un contexte...Ce contexte n'est pas si facile à saisir et d'en faire une synthèse lisible et fidèle me demande pas mal de travail...Oui, il me faut donc un peu de temps car je n'ai pas envie d'écrire n'importe quoi !Merci de ton encouragement