Carême ; Prière, Jeûne : au plus vrai, au plus simple...

Publié le par MICHEL

Pour la Prière et le Jeûne
Allons au plus vrai et au plus simple
avec deux Pères de l'Eglise


PRIERE

Saint Jean de la Croix (1542-1591), carme, docteur de l'Église

« Vous donc, priez ainsi »

Pour tout ce qui concerne la prière et les exercices de dévotion, a
ttachons-nous seulement aux rites ou manières de prier enseignés par le Christ.

Il est évident que lorsque les disciples ont demandé à notre Seigneur de leur apprendre à prier (Lc 11,1), il leur a sûrement dit tout ce qu'il fallait pour être exaucés du Père éternel, dont il connaissait parfaitement la volonté.

Or, il ne leur a enseigné que les sept demandes du Notre Père,
où est contenue l'expression de toutes nos nécessités corporelles et spirituelles. Il ne leur a pas enseigné une foule de prières et de cérémonies ;
au contraire, il leur a dit dans une autre circonstance
de ne pas multiplier les paroles en priant,
parce que notre Père céleste sait très bien ce dont nous avons besoin.

La seule chose qu'il leur a recommandé avec la plus vive insistance,
c'est de persévérer dans la prière, c'est-à-dire dans la récitation du Notre Père. Car il a dit aussi : « Il faut toujours prier, et ne jamais se lasser » (Lc 18,1).
Ainsi, il ne nous a pas enseigné à multiplier nos demandes,
mais à les redire souvent avec ferveur et attention.
Car, je le répète,
ces demandes du Notre Père renferment tout ce qui est conforme à la volonté de Dieu
et tout ce qui nous est utile.
Voilà pourquoi quand le divin Maître s'est adressé par trois fois au Père éternel, i
l a répété chaque fois les mêmes paroles du Notre Père,
comme le rapportent les évangélistes :
« Mon Père, si cette coupe ne peut passer sans que je la boive, que ta volonté soit faite » (Mt 26,42).

Quant aux rites que nous devons suivre à la prière, le Christ nous en a donné deux seulement : ou bien « se retirer au fond de notre maison » (Mt 6,6) ; là, loin de tout bruit et en toute liberté, nous pouvons le prier avec un coeur plus pur et plus dégagé... Ou bien rechercher les lieux solitaires, comme il le faisait lui-même, pour y prier au temps le plus favorable et le plus silencieux de la nuit (Lc 6,12).


voir : Le "Notre Père" ou la Prière reçue de Jésus !


l'Orante : catacombe Ste Priscille Rome

 

JEÛNE


Saint Aphraate (?-vers 345), moine et évêque près de Mossoul


« Quel est le jeûne qui me plaît ? N'est-ce pas faire tomber les chaînes injustes ? » (Is 58,6)

Les Ninivites ont jeûné d'un jeûne pur lorsque Jonas leur a prêché la conversion...
Voici ce qui est écrit :
« Dieu vit qu'ils se détournaient de leurs mauvais chemins ;
alors il détourna d'eux l'ardeur de sa colère » (Jon 3,10).
On ne dit pas : « Il vit une abstinence de pain et d'eau, avec sac et cendre »,
mais : « Qu'ils revenaient de leurs mauvais chemins et de la méchanceté de leurs oeuvres ».
Car le roi de Ninive avait parlé et dit :
« Que chacun se détourne de sa mauvaise conduite et de la rapacité de ses mains » (v.8).
Ce fut un jeûne pur, et il fut accepté...

Car, mon ami, quand on jeûne,
c'est toujours l'abstinence de méchanceté qui est la meilleure.


Elle est
meilleure que l'abstinence de pain et d'eau,
meilleure que « s'humilier soi-même, courber le cou comme un crochet
et se couvrir de sac et de cendre », comme le dit  Isaïe (58,5).

En effet, quand l'homme s'abstient de pain, d'eau ou de quelque nourriture que ce soit,
quand il se couvre de sac et de cendre et qu'il s'afflige,
il est aimé, beau aux yeux de Dieu et agréé.

Mais ce que Dieu agrée le plus,
c'est de «...délier les chaînes de l'impiété
et de couper les liens de la tromperie » (v.6).

Pour cet homme alors « sa lumière se diffusera comme le soleil,
et sa justice marchera devant lui.
Il sera comme un verger exubérant, comme une source dont les eaux ne tarissent pas » (v.8-11).
Il ne ressemble pas aux hypocrites « qui se composent un visage défait et prennent un air sombre »
pour faire connaître leur jeûne (Mt 6,16).


voir : Yom kippour....Pardonne nous...comme nous pardonnons



Jonas : peinture dans les catacombres romaines





Oui au Pardon. Non à la méchanceté, à la haine : autres textes (voir : Liturgie d'aujourd'hui)

 

Saint Jean Chrysostome (vers 345-407),
prêtre à Antioche puis évêque de Constantinople, docteur de l'Église

Homélie sur la trahison de Judas, 2, 6 ; PG 49, 390 (trad. Delhougne, Les Pères commentent, p. 95)

« Par sa croix, en sa personne, il a tué la haine » (Ep 2,16)

      Le Christ a donné sa vie pour toi et tu continues à détester celui qui est un serviteur comme toi ? Comment peux-tu t'avancer vers la table de la paix ? Ton Maître n'a pas hésité à endurer pour toi toutes les souffrances, et tu refuses même de renoncer à ta colère ?...  « Un tel m'a gravement offensé, dis-tu, il a été tant de fois injuste envers moi, il m'a même menacé de mort ! » Qu'est-ce que cela ? Il ne t'a pas encore crucifié comme ses ennemis ont crucifié le Seigneur.

      Si tu ne pardonnes pas les offenses de ton prochain, ton Père qui est dans les cieux ne te pardonnera pas non plus tes fautes (Mt 6,15). Que dit ta conscience quand tu prononces ces paroles : « Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié » et ce qui suit ? Le Christ n'a pas fait de différence : il l'a versé son sang aussi pour ceux qui ont versé le sien. Pourrais-tu faire quelque chose de semblable ? Lorsque tu refuses de pardonner à ton ennemi, c'est à toi que tu causes du tort, pas à lui...; ce que tu prépares, c'est un châtiment pour toi-même au jour du jugement...

      Écoute ce que dit le Seigneur : « Lorsque tu vas présenter ton offrande sur l'autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande là, devant l'autel, va d'abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande »... Car le Fils de l'homme est venu dans le monde pour réconcilier l'humanité avec son Père. Comme Paul le dit : « Maintenant Dieu a réconcilié avec lui toutes choses » (Col 1,22) ; « par la croix, en sa personne, il a tué la haine » (Ep 2,16).


Aelred de Rielvaux (1110-1167), moine cistercien
Le Miroir de la charité III, 5 (trad. Orval/bréviaire)

« Aimez vos ennemis »

      Rien ne nous encourage tant à l'amour des ennemis, en lequel consiste la perfection de l'amour fraternel, que de considérer avec gratitude la patience admirable du « plus beau des enfants des hommes » (Ps 44,3). Il a tendu son beau visage aux impies pour qu'ils le couvrent de crachats. Il les a laissés mettre un bandeau sur ces yeux qui d'un signe gouvernent l'univers. Il a exposé son dos au fouet... Il a soumis aux pointes des épines sa tête, devant laquelle doivent trembler princes et puissants. Il s'est livré lui-même aux affronts et aux injures. Et enfin il a supporté patiemment la croix, les clous, la lance, le fiel, le vinaigre, demeurant au milieu de tout cela plein de douceur et de sérénité. « Il a été mené comme une brebis à l'abattoir, il s'est tu comme un agneau devant celui qui le tond, et il n'ouvrait pas la bouche » (Is 53,7).

      En entendant cette parole admirable, pleine de douceur, d'amour et de sérénité imperturbable : « Père, pardonne-leur » (Lc 23,34), que pourrait-on ajouter à la douceur et à la charité de cette prière ?

      Et pourtant le Seigneur a ajouté quelque chose. Il ne s'est pas contenté de prier ; il a voulu aussi excuser : « Père, dit-il, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font. » Ils sont sans doute de grands pécheurs, mais ils en ont à peine conscience ; c'est pourquoi, Père, pardonne-leur. Ils crucifient, mais ils ne savent pas qui ils crucifient... Ils pensent qu'il s'agit d'un transgresseur de la Loi, d'un usurpateur de la divinité, d'un séducteur du peuple. Je leur ai dissimulé mon visage. Ils n'ont pas reconnu ma majesté. C'est pourquoi « Père, pardonne leur : ils ne savent pas ce qu'ils font. »

      Pour apprendre à aimer, que l'homme ne se laisse donc pas entraîner par les impulsions de la chair... Qu'il porte toute son affection à la douce patience de la chair du Seigneur. Pour trouver un repos plus parfait et plus heureux dans les délices de la charité fraternelle, qu'il étreigne aussi ses ennemis dans les bras du véritable amour. Mais afin que ce feu divin ne diminue pas à cause des injures, qu'il fixe toujours les yeux de l'esprit sur la patience sereine de son Seigneur et Sauveur bien-aimé.

 

Publié dans Prière...Culte...

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M
Merci pour ces trés beaux textes d'aujourd'hui qui peuvent aider notre méditation en cette période de carême!
Répondre
M
<br /> Internet nous permet un accès beaucoup plus facile à des textes anciens précieux jusque là un peu enfouis dans les bibliothèques spécialisés...<br /> Cordialement<br /> Michel<br /> <br /> <br />